Hut n°7 : cabane moirée dans le marais de Giez le long de la piste cyclable
S’abriter de la chaleur sous le soleil de l’été, en profiter pour échanger avec un marcheur croisé au détour d’un sentier de randonnée ou se reposer à l’abri des regards, prévoir sa descente en observant la courbure des montagnes jusqu’au lac d’Annecy ou grimper toujours plus haut le long d’un sapin jusqu’à en sentir l’odeur de résine.
Nous avons rêvé d’un espace déployable, à la fois modeste et généreux, qui puisse s’ouvrir et se fermer sur lui-même pour proposer une multitude d’usages, où viendraient se croiser des visiteurs, pour 5 minutes, une heure ou une après midi. En passant le pas de porte, on entrerait dans un lieu clos, relativement étroit, et traversé par trois chevrons horizontaux sur lesquels seraient attachées des cordes, tendues, évoquant celles des alpinistes escaladant les sommets voisins.
En décrochant ces dernières, on ferait s’ouvrir de larges panneaux de bois que l’on accompagnerait d’une main, les posant à l’horizontal sur les chevrons. Devenus assises, les panneaux laisseraient place au paysage, cadrant, selon l’ouverture, sur la vallée ou sur la pointe de la Sambuy quelques centaines de mètres en amont. Ces trois panneaux sont situés à des hauteurs variées, accompagnant le corps dans un mouvement vertical qui peut continuer en grimpant sur le toit à l’aide d’une échelle. Le long de cette échelle, on découvre, par l’absence de lattes de bardage, le tronc d’un sapin contre laquelle la cabane vient se nicher. Cette proximité continue lorsque, arrivé sur le toit, on se trouve entouré des branches de l’arbre. On peut alors profiter d’une vue imprenable sur l’ensemble des Sources du Lac d'Annecy et qui sait, peut-être même apercevoir certaines des onze autres cabanes réalisées.
Lieu d'imagination, de création, de bêtises et d'aventures, la cabane nous renvoie directement à notre enfance. Elle symbolise un espace de jeu ou tous les rêves sont permis.
Notre projet met en scène de manière poétique l'imaginaire de la cabane à travers un volume épuré. Sa présence flotte dans le paysage comme un bâtiment fantôme et appelle aux rêveries de chacun. La cabane que nous proposons est placée au sud-est de la parcelle n° 2723 du site n° 4 entre les arbres. Elle agit comme un révélateur, un catalyseur du paysage environnant. Une enveloppe fine et légère, conçue comme un claustra, filtre le paysage tout en dessinant l'archétype de la maison: quatre murs et un toit en pente, le fondement de toute architecture humaine.
L'élégante claire-voie perce la profondeur de l'espace et modifie la perception du paysage. Le spectre blanc qu'il matérialise absorbe le paysage en même temps qu'il contraste avec lui selon la position du visiteur. Sa masse apparait comme une évidence ou s'efface dans son environnement, alternant le mystère et la certitude. Oscillant entre entité et légèreté, elle donne la sensation d'un mouvement perpétuel traduisant spatialement le caractère mystérieux et imaginaire d'un cabane.
Le volume joue avec son environnement comme une illusion, matérialisant l'irréel.
Hut n°3 château de paille sur la route de Cons
En prenant connaissance du site, nous avons cherché à en exprimer le caractère principal. La rivière et le pont sont proches mais hors de la parcelle tandis que deux routes bordent l’espace disponible. En recherchant l’essentiel nous avons conclu que le site n°3 était tout simplement un champ bordé d’arbres, une prairie. Une aubaine d’architecte si l’on a en tête le Campo de Pise ou encore les Prairie Houses de Frank Lloyd Wright, mais un lieu d’implantation complexe pour l’installation d’une cabane comme on l’entend communément. Il nous fallait imaginer une architecture qui puisse se suffire à elle-même et être évidente dans son contexte, simple et construite avec un matériau adéquat.
C’est alors que nous avons eu en tête l’image d’un tas de paille après les moissons, des ballots empilés comme seule présence dans le champ. Une forme de construction des plus simples que toute personne plus ou moins proche du monde rural a déjà vue ou expérimentée pendant son enfance ou au cours de sa vie. C’est une forme vernaculaire riche en sensations par l’odeur de la paille, son contact moelleux et un peu piquant sur la peau, comme un vieux pull qui gratte mais qu’on apprécie, sa couleur dorée qui brille au soleil et par le bruit feutré entre les ballots. L’imaginaire collectif est aussi vaste, de la sieste dans les foins aux jeux d’enfant, en passant par la première maison des trois petits cochons...
Nous avons donc décidé de faire un tas de paille et de creuser dedans, afin d’accueillir toutes ces expériences. En décalant certains ballots des ouvertures se créent et laissent passer une lumière tamisée et chaleureuse dans la cabane. A l’intérieur, certains blocs sont posés et agencés pour permettre l’assise, la sieste ou l’exploration du volume. D’un point de vue technique, les ballots sont simplement empilés pour former sol et murs, maintenus en compression par le poids de la toiture. Les portées en linteaux sont rendues possibles par fixation de planches de bois retroussées à l’aide de tiges filetées, écrous et rondelles larges, au-dessus du ballot. En toiture, nous avons imaginé des poutres composées, constituées de ballots alignés et serrés entre deux planches à l’aide du même système de tiges. Une fois juxtaposées, ces poutres forment la couverture. Si besoin, il est possible à la fois d’imperméabiliser la cabane (en la couvrant simplement d’une bâche) et également de raidir la structure (à l’aide de tiges filetées qui lieraient les ballots entre eux). Le dernier point d’importance est qu’en plus d’un faible coût de construction, tous les ballots de paille peuvent être récupérés et réutilisés après déconstruction de la cabane.